Journal - Page 8
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Comme autant de scories pétrifiées
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"Silhouettes", un poème de Daniel Martinez
Tout s'est évanoui, la lumière à la fin
de la neige a cerné les fleurs de ta bouche
dont les froids vifs avaient éprouvé les lèvres
descendant le long de la nuque
l'ombre s'est faite au beau milieu du temps
dans une ville de voyage où tu avais passé
il y a de cela des années
Il en reste comme le fil comme l'ailleurs
d'un dessein impossible
avec ses regards en dehors
ses regards en dedans
qui ne savaient attendre que se constitue
la très pauvre cendre des souvenirs
inquiètes de mourir de mort lente
sans avoir dénoué la profondeur
sans avoir rêvé à la lueur d'une flamme
de bougie posée à terre
là au centre d'un rien sans limites
la vie semble s'être retirée
Regarde sur ta paume se dessiner
les pleins et les déliés dans l'espace
des paroles échangées
un liséré d'eau sertir
chaque fois plus indéchiffrables
les silhouettes des arbres
qui pénètrent dans la maison
pour s'enliser à mesure
dans un azur terrestre
où se projettent et se confondent
toutes les œuvres humaines
et le vouloir qui les tient réunies
dans un secret espoir de réconciliation
entre les deux pôles qui les embrassent
comme ramenées à elles
nues à la mortelle blancheurDaniel Martinez
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"Rideau ouvert", un poème de Daniel Martinez
L'astre a blêmit, clair de lune engourdi dans le blanc et noir des anciennes photographies. Un peu comme ces vœux en attente à remodeler à l'infini, traces de craie sur le tableau noir. Là, tu te revois, crédule à la façon de qui s'accrocherait aux branches basses de l'acacia à deux pas de la fenêtre restée ouverte. Faites vos jeux, rien ne va plus : les années belles, tu en agites seulement les effiloches, ainsi va.
Voici, pour marquer la nouvelle année 20 et vingt additionné de cinq unités ce poème écrit sans façon, où le Temps serait l'enfant royal dont nous entretient Héraclite :à Jean-Yves Cadoret
Densité du mouvement que percent
les gouttes de pluie où la spirale
du feu rouge descend dansante
entre les chardons là décapités
il flotte dans l'air une épaisse
vapeur d'eau bientôt l'heure zéro
qui marquera le passage à l'an neuf
bientôt ce premier quart de siècle échu
montrera quel fut son vrai visage
au rythme des pas qui s'éloignent
tu regardes les battants de fenêtres
restées ouvertes malgré le froid
Ici c'est la campagne les bouleaux
de la forêt voisine comme taillés
dans la pierre méditent à l'envi
le Grand-Morin s'affaire reflété
dans ton souffle fondant
comme de la neige froide dans la bouche
il était bien temps que le hasard
trace son sillon pour signifier ce qui
de guerre lasse nous sera rendu
à la toute fin des temps1er janvier 25
Daniel Martinez