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  • "De la mélancolie", un poème de Daniel Martinez

    Et l'eau recouvre l'eau
    un navire remonte jusqu'à l'être
    pour rendre visage à l'alliance du sel
    et du soleil fauve qui effleure
    l'infini devenu mouvement
    tu t'avances au faîte des envies
    porté par cette onde qui va
    sourdre des rochers
    plus noueuse que la colère
    à nu de mots d'images et de sens
    sous la peau diaphane traversée
    par un pli sombre à la base du firmament

    Elle est là lovée dans l'embrasure de la porte
    qui te sourit entre les maux
    et les délices de la mélancolie
    au travers d'un natté jaune d'or
    une idée d'herbe remuée sous les mains
    où l'on écoute le rien pénétrer
    une histoire qui serait la nôtre
    quelque chose qui se rapproche 
    de ce que l'on appelle de ses vœux
    et qui n'aurait d'autre souci
    que d'être touché par la présence
    qui couvre nos voix discordantes
    muette mais certaine
    elle passe d'une rive à l'autre
    vole file et flotte ou se mêle enfin
    à la musique lancinante du vertige


    Et que dire et que faire 
    sinon drainer l'amer
    asile du recueillement
    que sommes-nous sinon 
    le recel d'un passage et du repère
    qui se donnent et nous minent
    dans le nu et l'attente
    griffée sur la paroi
    un élargissement solaire
    plus corrodant que la chimie des vagues
    ouvertes au plus offrant


    Tu t'y retrouves dans ce cercle de danse
    tout air et toute terre alentour
    confondus à ce qui n'a pas de nom
    mais vibre jusqu'à l'ultime instant
    en guise d'autres lunes


    Daniel Martinez
    04/8/25

  • "Le Premier Homme" d'Albert Camus, éd. Gallimard, novembre 1994, 333 pages

    Le fil de l'intrigue :

         "En 1913, Henry Cormery arrive d'Alger pour prendre la gérance d'une ferme dans un petit village près de Bône. Il est accompagné de sa femme sur le point d'accoucher. À leur arrivée, elle met au monde leur fils, Jacques. Quarante ans plus tard, nous retrouvons Jacques, devenu adulte, qui tente de savoir qui était son père. Celui-ci, mort lors de la Grande Guerre, un an après sa naissance, lui est donc inconnu. Jacques se rend pour la première fois sur sa tombe à Saint-Brieuc. Peu après, lors d'un voyage à Alger où il rend visite à sa mère, Catherine, il retourne à Bône pour tenter de savoir qui était son père. Tentative vouée à l'échec car les traces du passage de son père ont disparu. Sa mère, qui parle très peu, ne lui apprend rien de plus. Jacques se souvient de son enfance dans la maison de sa grand-mère chez qui vit Catherine, depuis la mort de son mari, avec son frère sourd et son oncle.

         C'est une famille illettrée et très pauvre. Il rentre à l'école où il côtoie des enfants de parents plus aisés et prend plaisir à étudier. Son instituteur remarque ses aptitudes et rend visite à sa famille pour la persuader de le laisser étudier au lycée. La grand-mère commence par refuser dans la mesure où elle compte sur le futur travail de Jacques en apprentissage pour apporter un peu plus d'argent au foyer. L'instituteur réussit cependant à la convaincre de le laisser passer l'examen des bourses pour entrer au lycée. Il lui donne gratuitement le soir des leçons particulières avec quelques camarades. Jacques sera reçu au lycée. 
         Le Premier Homme a été le dernier roman d’Albert Camus. Lors de l’accident mortel de l’écrivain, le lundi 4 janvier 1960, on trouva sa serviette qui renfermait des papiers personnels, des photos, quelques livres dont le Gai savoir de Nietzsche et une édition scolaire d'Othello, son journal et le manuscrit qu’il était en train d’écrire pour lequel il avait déjà trouvé le titre : Le Premier Homme. Ce n’est qu’en 1994 qu’on a publié ce roman inachevé dont seulement la première partie a été rédigée ; deux chapitres de la deuxième partie avaient été écrits et la troisième manque totalement. Il s’agit d’un fragment que l’auteur aurait sans aucun doute retravaillé. Ce roman est ainsi devenu le testament de Camus, son ouvrage le plus autobiographique parce qu’il y conjure son enfance et sa jeunesse. Et l’on trouve encore des traces dans le manuscrit qui renvoient immédiatement à la réalité autobiographique ; il écrit ainsi par inadvertance « Veuve Camus » (189) pour Catherine Cormery ou le nom réel de son instituteur « M. Germain » à la place de M. Bernard (138). Si la substance de l’œuvre est autobiographique, la forme ne l’est pas ; il n’y a pas de pacte autobiographique. C’est un récit à la troisième personne et les figures ont des noms fictifs. L'alter ego de Camus s’appelle Jacques Cormery ; or Cormery était le nom de jeune fille de sa grand-mère paternelle. C’est un renvoi implicite à la dimension autobiographique.
    "

         L'extrait qui suit appartient à la première partie du livre : "Recherche du père", en sa sixième section intitulée "La famille". Rappelons qu'Albert Camus (dont les ayants droit ont refusé post mortem la panthéonisation) est né à Mondovi (actuellement Dréan) en 1913. Bien que le nom de la ville ne soit pas mentionné dans le roman, ce qui nous est conté ci-après retrace la vie toute simple de cette commune située sur la côte orientale de l'Algérie.
         Voici, pour la rubrique "cinéma", avec le respect que portait l'auteur aux petites gens, un respect non démenti jusqu'à sa fin :

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