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Diérèse 84

  • "L'œil caresse la forêt, jamais il ne s'y perd" - François Nourissier

    Les bouleversements prévisibles liés à l'actualité internationale m'incitent à gagner en facteur temps sur la sortie du numéro 84 de Diérèse, initialement prévue en juin et qui devrait avoir plutôt lieu en mai, "le joli mois de mai", comme dans la chanson. Le temps historique s'accélère, chacun peut l'observer et le vivre à sa façon, distanciée ou pas - la mienne ne l'est pas trop, pour être franc.
    Toujours est-il que l'élément culturel en cette année tout particulièrement pourrait finir par être avalé par son environnement, néfaste à son développement harmonieux, l'harmonie aurait-elle du fait même perdu droit de cité ? Espérer en l'avenir est pour l'heure la seule option possible, à défaut de pouvoir l'infléchir dans un sens favorable - et profitable à la fois. Pour soi, pour les autres, pour l'humanité qui se cherche.
    Tout va très vite, oui : "Pour être heureux, ne pense pas !", m'écrivait Jules Mougin. Mais comment éviter de prendre feu face aux bateliers d'Apocalypse ? quand l'encre et le papier sur la feuille se tournent résolument vers le temps intérieur. N'y aurait-il, au fond, conflit de temps ?, au-delà des conflits d'intérêts, si vifs, si cruels, dans l'espace de la vie, démesurément courte au regard de ce que nous en attendons, de ce que nous serions en droit d'attendre d'elle.
    Pour m'évader, je me reporte aujourd'hui aux pages manuscrites confiées à Diérèse par Matthieu Messagier, parmi les toutes dernières qu'il aient écrites. En page 8 (il y en a 24) :
             "Les âmes des hommes
             Souvent
             Possèdent une douceur
             Inversement proportionnelle
             A la violence
             Des reliefs et climats
             Qu'ils habitent..."
    Il est sorti de ce monde sans s'être aperçu que la violence de l'homme est tout aussi considérable que celle de la nature quand elle se déchaîne. Il valait mieux pour lui qu'il en soit ainsi, qu'il en soit resté au premier épisode, à cette histoire d'"Un homme (qui) marche sur un fil couvert de papillons de nuit" (David Gascoyne), afin de trouver s'il se peut l'équilibre. Au fond, la vie échappe aux vivants, même si elle ne les nie, elle efface sans remords l'avant à mesure et se maintient ainsi, comme puissance régnante. Ce n'est souvent que de cet avant que nous cherchons le sens, trop rapide le flux présent pour le décrypter en son entier quand il nous prend en lui, sans lui. Solitude foncière de l'homme.
    On dit bien "tuer du temps", comme s'il fallait pour signifier son existence faire périr ce qui la sous-tend afin d'être. Cette équation de la vie, illustrée par Gauguin dans sa toile : "D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?", peinte à Tahiti lors de son second séjour sur l'île, à la toute fin du dix-neuvième siècle. Le peintre avait décidé de se donner la mort après l'avoir menée à son terme, cette fresque monumentale (131,9 cm x 374,6 cm) conservée de nos jours au Musée des Beaux-Arts de Boston. Voir le Temps, le représenter dans son déroulement serait-il in fine la transgression suprême, une mise à mort de soi, concomitante ? Aussi bien, dans cette rumeur physiologique qui nous fait écrire, de quelle part de nous-même, sciemment, nous privons-nous, jusqu'à plus soif ?

    ... J'ai écrit il y a des années, en pensant tout du long à André Frénaud, le poème qui suit, ceux qui connaissent bien son œuvre verront auquel de ses livres il fait référence :

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  • "La voix dénouée", Daniel Martinez

    Le tout récent envoi d'un poème de Paul Cabanel, un auteur de Diérèse, me donne envie de vous soumettre ce texte de mon cru, élégiaque aussi bien qu'inédit, daté du 4 avril 2011 - sans y apporter de retouche. Il faut vous dire que, depuis le 24 février, écrire des poèmes m'est des plus difficiles s'il faut bien par là confirmer, à l'instar des éditions L'Amourier, la gêne (a minima) éprouvée à leur donner audience par ces temps de guerre, où s'amoncellent les morts, les vies brisées.
    ... Le roman ne serait-il dans les circonstances plus admissible ?, je me suis donc plongé dans "Arthur Cravan n'est pas mort noyé", de Philippe Dagen (Grasset, août 2016) dont la presse littéraire de l'époque n'a pas fait ses choux gras. Ou bien encore, ici et maintenant, approcher de plus près les arts plastiques ?, au Musée d'Art Moderne de Paris
    l'exposition Toyen emporte sous son aile un petit Tanguy peint sur carton qu'il lui a dédicacé en 1935, remarquable. Sachant que cette œuvre n'a pas été recensée dans le catalogue complet établi par Kay Sage, l'épouse de Tanguy - qui se suicida par balle en 1963, quand elle eut terminé la rédaction dudit catalogue.
    L'occasion de vous rappeler que le premier livre de Pierre Dhainaut,
    "Mon sommeil est un verger d'embruns", a été illustré par cette artiste majeure de la sphère surréaliste, Toyen - elle crée avec Jindrich Styrsky "l’artificialisme", se réclamant d’une totale identification "du peintre au poète". Sans oublier de consulter, de Sabine Dewulf, "En regard, à l’écoute, La poésie de Pierre Dhainaut à travers les livres d’artiste" (éditions invenit, 2021).

    peinture sur carton de Yves Tanguy dédicacé à Toyen en 1935  9 x 12,5 cm MNAM.JPG

    Peinture sur carton d'Yves Tanguy, 9 x 12,5 cm, col. particulière

    Et puis, folie des temps présents, la mise à prix par la maison Christie's le mois prochain d'un portrait de Marilyn Monroe "peint" par Andy Warhol à 180 millions d'euros - qui deviendrait ainsi l'œuvre d'art du XX e siècle la plus chère jamais vendue - me laisse pantois.

    La maquette de Diérèse 84 avance, cette livraison comptera 320 pages (celles et ceux à qui je n'ai pas envoyé d'épreuves seront publiés in Diérèse 85). Il me reste, entre autres (...) à finaliser la couverture, après l'achat en début de semaine de deux tubes de couleur (blanc de zinc et crème d'acrylique papaye). Le dossier Werner Lambersy (Cahier 1) couvrira les pages 49 à 101, avec des inédits de l'auteur de "Maîtres et maisons de thé" et les textes que huit auteurs ont écrit pour lui rendre hommage. Un autre Cahier intitulé "Bleu vif" regroupera des études sur les poètes Angèle Paoli, Marie Alloy, Jean-Claude Pirotte et Georges Perros. Le titre de la livraison ? "Chemins d'écriture". Ne m'en demandez pas plus pour aujourd'hui. A bientôt !, amitiés partagées, DM

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  • En préparation...

    Diérèse a fêté ses vingt-quatre années d'existence le 21/3/22. J'aurais préféré que ce soit dans un autre contexte, international j'entends, mais... Je ne crois pas que la poésie doive se désintéresser de la folie du monde, ni se retrancher dans cette fameuse "tour d'ivoire" de Montaigne, dussé-je décevoir quelques-uns. Car les poètes (lyriques, objectivistes, spatialistes, lettristes, et tous les déterminants derrière lesquels ils peuvent se ranger ou dont ils veulent s'exclure) sont et font bien partie intégrante de ce monde-ci, déconcertant à tout le moins - Denis et Liza, artistes ukrainiens que nous connaissons, ma femme et moi : lui joue de la flûte traversière, son épouse, de la harpe -, n'en disconviendraient pas.

    Deux mille vingt-deux, ainsi que je l'ai écrit quelque part, est sans conteste une année de mauvais aloi.

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    Le bureau de Montaigne, en son château

    Le ton de l'éditorial du numéro 84 de Diérèse en gésine, est dans le droit fil de ces quelques remarques, plus contextuel que d'accoutumée : l'auteure Sophie Grenaud s'en est chargée. Et puis, vous pourrez vous plonger dans un dossier sur le poète belge Werner Lambersy, très conscient qu'il fut des heurs et malheurs de l'époque, dossier concocté avec sa veuve Patricia (toutes les signatures attendues seront bientôt réunies). Un sommaire donc, quelque peu chamboulé au regard de ce qui a été publié au colophon du numéro 83, mais respecté dans ses grandes lignes. Je me suis fixé 320 pages pour la livraison en préparation et ne pourrai pas aller au-delà (sachez que pour chaque numéro, je dois faire face à pas loin de cinq cents pages sélectionnées, dont la publication ne peut être que reportée pour certaines d'entre elles).
    En première de couverture figureront et le nom de ce poète décédé en octobre 2021 et celui d'Alain Fabre-Catalan (avec une suite de poèmes inédits traduits en italien par les bons soins d'Elisa Bartolini).
    Je continuerai sur cette lancée en vous parlant du deuxième éditeur de Werner Lambersy, j'ai nommé Henry Fagne.

     

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