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Journal - Page 11

  • "Le nom des sources", Daniel Martinez

    Ecoute ce qui de son chant simple te questionne se défaire
    cette part que les hommes ôtent
    aux communes splendeurs
    tout au fond de toi la souffrance palpiter
    comme le trésor des mots
    livrés à l'encan
    vois ces faussaires

    lever leurs bras d'ombre
    l'impôt d'une morale
    servile
    traversant des sillons parallèles

    ces bardes de la longue nuit 
    hanter les semailles ne chercher plus rien
    qu'un lièvre à débusquer
    pour mieux lui cribler le flanc écoute


    Au juste que te dit la vie
    le monde est un bien triste théâtre
    et qu'est-ce donc que l'homme
    voyageur sans repos quand halètent les vents
    sur les feux de la veille mal éteints
    pour ranimer  un tant soit peu
    cette verve qui nous compose
    et ne voudrait se laisser flétrir


    comme par le toit crevassé
    les amants n'en finissent pas 
    d'approcher de leur corps
    l'infini qui se dilate aux lèvres de l'étang
    quand gémissent de plaisir
    nos songes les plus fous
    là même où l'arbre humain se remémore
    le nom des sources des fleuves et des années


    Daniel Martinez

  • "Ebauche de l'après", Daniel Martinez

                                                                  à Jean-Paul


    A
    u jour venant le cristal de l'air

    et le cristal de l'eau
    diffusaient un rayonnement
    de poudre d'or et de bleu pur
    des flammes dansantes filtraient
    par les cœurs des contrevents
    au bord d'un monde inconnu
    la robe qui le couvrait
    en inventait le corps


    Alors tout en toi s'est tu
    et le mouvement profond de la terre
    accompagnait à sa manière 
    le fleuve qui avait changé de sens
    ses syllabes dessinaient
    une demeure inexplicable
    bouche blanche frappée de feu


    Là ce qui s'écrit sans crier gare
    confondu à la foudre du désir
    aux grimoires du firmament
    annonçait la dame du Songe
    sa juste note dans le jour innocent
    aimée des rêveurs

    autant de nuages effilochés
    selon l'ardeur des vents
    arrachés aux bras de l'arbre
    à leurs lacis phosphorescents

                                                              Daniel Martinez              
                                                              Saint-Mandé, le 28/1/2024

  • "Chardons de neige", Daniel Martinez

    Au feu couvant des mots de nuit
    ces doigts que serre l'eau gelée
    jusqu'à l'heure la plus discordante
    savaient que nous n'étions plus 
    qu'hirondelles sous les solives
    sous les aiguilles du pouls
    effleurant l'écorce arrachée à son tronc


    L'heure s'est arrêtée dans sa robe à trous
    et le palais dort sous ses lustres
    avec au centre de ce centre
    l'escalier qui n'en finit pas
    entre les chardons de neige pleurent
    tes mains sous la baguette d'or
    les visages d'orge et d'armoise
    confondus aux tremblements de la mémoire

    La terre ne continuait-elle pas à tourner
    le silence à décomposer
    l'immensité stellaire
    en ses fines attaches noires
    laissant les êtres dans sa trace
    conquis par un néant muet
    plus près plus près encore
    de la grande vallée 
    et des ruisseaux qui se croisaient dans l'air
    qui allaient qui venaient


    Tout en soi brûlait
    sans flammes aucune
    un puits au bord
    de la mer de Cristal
    des éclats d'astres
    des bris de sens
    projetés là


    Daniel Martinez