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Grand absent des anthologies de poésie, Jean-Loup Fontaine est né le 15 mars 1947 à Loos-en-Gohelle, et décédé le 12 mai 1993 à Lille, à quarante-six ans (je vous laisse deviner l'origine de cette disparition prématurée). Il a toujours écrit, car « la poésie répond au besoin d'exaltation, au besoin du sublime, qui est celui de tout être chez qui les préoccupations du prix de revient n'ont pas encore tué tout sentiment d'humanité. » (lettre à Guy Rouquet, 1992, in L'âge de la parole).
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"Gisements" de Lorand Gaspar, éditions Flammarion, octobre 1968, 126 pages, 1680 exemplaires, 7,50 F
Sur ce grand poète, un article intéressant a paru in Diérèse 89, signé par François Migeot. Gisements est le deuxième livre de Lorand Gaspar, son premier recueil : Le quatrième état de la matière, ayant été couronné par le Prix Guillaume Apollinaire, en 1967. Ecoutons-le tenter de définir ce médium singulier qu'est la poésie :
"... une pensée se dégage, se précise souvent (peut-être toujours) de la même manière, à partir d'un magma actif d'où jaillit une première lueur, une intuition, suivies d'une recherche de mots justes pour leur donner une première forme, puis c'est un va-et-vient entre enchaînements d'idées et de mots avec des retours et rectifications (ajustements, remaniements, approfondissements), où ce qui vient d'être exprimé semble relancer, parfois même ouvrir la pensée."
J'aime particulièrement cette approche, conçue à partir de la notion de "magma actif". Le poète n'écrit pas à partir d'un vide existentiel mais en lien avec une passion dévorante, suivie d'une entrée en résonance ; et dans ce sens celui qui fait œuvre de poésie serait - ou bien pourrait/voudrait être - en quelque sorte un "supraconducteur". Il entame un dialogue qui interroge le singulier et l'universel, la langue, la terre au sens large du terme et déborde finalement les cadres d'un pays donné pour élaborer un espace verbal tenant de l'imaginaire et de l'affectif, conjugué à cette impulsion de départ sans laquelle rien ne serait possible.Ecoutons-le ici, dans le quatrième chapitre intitulé :
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"Une chambre conjecturale, poèmes ou proses de jeunesse par Paul Valéry", éditions Fata Morgana, 88 pages, 17 mars 1981, 1000 exemplaires
Peu connus des lecteurs, les écrits de jeunesse de Paul Valéry méritent pourtant l'attention, tant ils préfigurent l'œuvre future, déjà exigeants quant au style, préoccupation première de l'auteur de La Jeune Parque, dont les trente textes choisis sont bien des poèmes en prose, malgré la relative ambiguïté du titre. Le recueil "Une chambre conjecturale..." est ici préfacé par Agathe Rouart-Valéry, fille de l'écrivain qui précise que "ces adolescentes proses", antérieures à la "nuit de Gênes" "datent de 1888 à 189... ; l'auteur avait de dix-sept à vingt et peu d'années."
J'aime particulièrement dans ces textes cette façon qu'a Valéry de se qualifier : "Acrobatique poète, clown/
Je désire m'élancer d'un bond et sauter dans le vide bleu..." ; et qui, dans à peu près le même registre renvoie au poème "Clown" d'Henri Michaux, lui se voyant alors "vidé de l'abcès d'être quelqu'un" et concluant par "Je plongerai. / Sans bourse dans l'infini-esprit sous-jacent ouvert à tous..." (Peintures, 1939).Voici :