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"La Foudre", de Lydie Dattas, éditions Mercure de France, 128 pages, 14,50 €
Par Christian Bobin
Il n'y a de vérité que dans l'élan.
Dix ans après, allégée de sa cargaison d'adjectifs, la barque d'or de "La Foudre" accoste au rivage des librairies. Montons à bord. En dix ans le monde s'est enténébré et les visions délivrées par cette écriture sont porteuses de remèdes. "Pas moi" fut la parole de la fillette de quatre ans quand sa mère actrice, décidant de commencer une carrière en Angleterre, emporta toute la famille dans la tornade de son angoisse. La grande sensibilité n'est parfois pas séparable de la grande psychiatrie. L'exil frappa au cœur ses trois enfants couverts de dons, et son mari, compositeur, titulaire du grand orgue de Notre-Dame que par amour il quittera. La petite "Pas-moi" grandit à l'intérieur de ce faux calme qui est au centre d'un cyclone. Elle y vole de merveilles en merveilles : son goût surpuissant de la vie fait d'elle l'héroïne du premier livre cartonné qui l'a éblouie, "Les Mille et Une Nuits". "La Foudre" est "Les Mille et Une Nuits" en miniature. "J'aimais tellement la vie, dit Lydie Dattas dans son "Carnet d'une allumeuse", que j'aurais pu en mourir. Percé de soleil rouge mon verre de grenadine m'était une Sainte-Chapelle." Elevée dans le froid des églises sous les stalactites des orgues, elle sera attirée par l'archétype contraire, un antidote : le Cirque d'Hiver de Paris. -
Jacinto Luis Guereña, une vie en poésie
Poète et critique littéraire espagnol (Buenos Aires, 1916 - Madrid 2007), Jacinto Luis Guereña arrive en France après l’effondrement de la République en Espagne, après avoir connu les camps d’internement. Libéré, il occupa divers postes en temps qu'enseignant : à Pau où il fonde la revue Méduse (1945-1947), puis à Toulon. Le poète espagnol lègue une œuvre lyrique dense. Ses premières œuvres furent publiées en français, notamment L'homme, l'arbre, l'eau (1945), Mémoire du cœur, Paris (1953), Loin des solitudes (1957) ou Guitare pour la nuit (1958). L’œuvre poétique en langue espagnole est cependant la plus significative ; on peut citer : Pour un manifeste (1976), L’Office du regard (1990), Poèmes contre poèmes (1992), Oubli d’une mémoire (1995), L’Imprudent midi (1998), Corazón de miedo y de sueños : (Anthologie 1946-2001) Renacimiento, Séville, 2013.
On lui doit aussi des traductions en espagnol de Jules Supervielle, René Guy Cadou, Verlaine et Baudelaire. Ainsi que des collaborations en revues, comme La NRF, Esprit, Diérèse, La Tour de feu, Europe, Iris, Artère, Le Temps de la poésie...
Les traductions de poèmes qui suivent sont extraites de El oficio de la mirada (Seuba Ediciones, Barcelone, 1990).