Diérèse et Les Deux-Siciles - Page 97
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Hubert Lucot s'entretient avec Alain Veinstein, septembre 1984
Hubert Lucot est un auteur hors du commun, que j'ai découvert en 1984, alors qu'il composait "Le Grand Graphe", ouvrage alors composé d'une seule page aux phrases entrecroisées, sur une surface de 12 mètres carrés, plus tard édité par Tristam (1990)... Nous publiions alors dans Les Cahiers du Shibboleth, une revue de poésie éphémère et bien sympathique, sise à Bègles, dirigée par Francis Giraudet et Bérénice Constans ; l'ami Jean-Claude Pirotte, tout comme William Cliff y ont aussi participé - sans oublier de mentionner Pierre Bettencourt, Antoine Emaz, Claude Louis-Combet, Marcel Béalu, Claude Pélieu... et bien d'autres, qui me pardonneront de n'être ici qu'allusif.
Son histoire ?, il ne s'en cachait pas. On peut la lire - en ce qui regarde les dernières années de sa vie - dans Diérèse 63 : numéro paru en avril 2014, avec des extraits de Sonatines de deuil (ce, en avant-première). Un an plus tard, Sonatines de deuil devait paraître chez Hachette, collection P.O.L.
Que disait-il alors, qu'écrivait-il ? Hubert Lucot avait rencontré Anne-Marie Bono (dans ses livres : Annie B., puis A.M.) en août 1955 dans le Sanatorium des Etudiants de France, à Saint-Hilaire-du-Touvet (Isère). Et ils décidèrent de se marier, à Paris, en août 1958.
Décès de sa femme le 9 août 2012. Sonatines de deuil est un journal qu'Hubert Lucot commença à rédiger quelques semaines après la mort de son épouse. Ce qui avait paru dans Diérèse 63 : les pages datées du 1er septembre au 1er novembre 2012.... L'entretien qui suit a eu lieu au cours de sa quarante-neuvième année, rue des Tournelles, du côté du quatrième arrondissement parisien, alors que venait de paraître Langst (éd. Hachette, collection P.O.L.).
Pour mémoire, Hubert Lucot a commencé à être publié en 1969, à 34 ans - et non à 45 ans, comme il a pu (parfois) l'écrire, sur le tard. -
"Diérèse" numéro 15, septembre 2001, 200 pages, 5,34 €
Diérèse en était à sa quatrième année d'existence. A l'époque, la Bibliothèque nationale de Londres décidait que, faute de place et d'argent, les livres jamais consultés seraient envoyés au pilon ; ladite bibliothèque faisait dans le même temps appel aux lecteurs français pour parrainer des livres du domaine francophone menacés d'extinction.
Et puis le talentueux traducteur Bernard Simeone s'éteignait, le 13 juillet 2001, à l'âge de 44 ans. Traducteur de Mario Luzi, qu'il admirait et que le poète italien tenait en grande estime, Simeone avait fondé en 1988, chez Verdier, la collection "Terra d'altri", permettant au lectorat francophone de découvrir des écrivains italiens d'importance. Dans son Anthologie de la jeune poésie italienne, il insistait sur la "lisibilité de cette poésie", qu'il attribuait au fait que ces "poètes qui comptent aujourd'hui en Italie ont su dépasser (parfois en le niant, parfois en l'intégrant) l'héritage paradoxal des avant-gardes".Dans ce numéro 15, on pouvait lire des traductions alors inédites de Leopoldo María Panero, par Luc Demeuleneire. Ce poète, mort en hôpital psychiatrique, est ainsi présenté dans l'"Histoire de la littérature espagnole", aux éditions Critica :
"Panero (Madrid, 1948, Las Palmas de Gran Canaria, 2014), de par des circonstances personnelles qui transparaissent en permanence dans son œuvre, est un cas à part parmi les poètes contemporains. Maudit par nécessité, déchiré, chaotique, il a fait de la folie et des théories psychiatriques les protagonistes de son œuvre. (...) Certains critiques considèrent sa trajectoire poétique comme l'une des expériences esthétiques contemporaines les plus radicales."
Voici, extrait de "Ainsi fut fondée Carnaby Street", livre paru en 1970, le poème retenu par Diérèse opus 15 (pages 158-159). Ce texte, l'un des meilleurs du poète, est dans la lignée des écrits de Philip Lamantia (cf Diérèse 46, oct. 2009, pages 110-116) :