Diérèse et Les Deux-Siciles - Page 19
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Souviens-toi semble dire la source
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"Aux confins", poème de Daniel Martinez
L'appui de la fenêtre garde les pierres tièdes encore
la chaleur maintenant diffuse a fait trembler les collines
elle voit devant elle sa vie défiler
un voile mauve sur la langue
les sables d'un feu sans brûlure
L'air remue très loin selon un rythme parfait
et la voix des vents s'enroule à même
l'haleine bleue régnante
sous le cri pincé d'un martinet
c'est l'heure du passage
l'heure où l'encre sur la page blanche
boit la manne de la saison
Elle se penche sur la table
et de ses mains voyeuses
dessine l'ombre de son premier amour
ses doigts transparents
fouillent le buisson de sa chevelure
les linges secrets du corps
se font vies simultanées
L'horizon sans appui
rappelle à lui les orges ici et là
insinue entre ses joues
et le mur de ciment rose
le suc d'un raisin généreux
Marie-Aude revoit précisément
paumes en alerte
la langue du cresson
et sent la mince horloge des rides
au tambour des tempes
ébaucher le hasard à grands traits
La caverne du cœur
dévorée de l'intérieur
tient le nid au plus haut
ailleurs selon le peu d'ici
soulevée par des châteaux enrochés
chevilles déliées il n'est plus rien qui puisse
la soustraire aux désirs d'être
un peu plus que la plus inachevée
des théories du ciel
Daniel Martinez
(15/8/24) -
"L’homme descend du singe", un enseignant en classe de CM1 (2023/2024)
M'interrogeant sur l'enseignement dispensé à notre fille Gaëlle, en classe de CM 1, j'ai nourri quelque inquiétude sur ce qu'il lui a été dit des origines de l'homme.
Qu'il me soit permis de rectifier ici l'affirmation de son maître, en guise de lettre-réponse Monsieur Chaze*:"Il faut replacer les choses dans leur contexte : au moment où le naturaliste britannique Charles Darwin a formulé cette théorie révolutionnaire dans son ouvrage De l’origine des espèces en 1859, l’idée était totalement nouvelle et dérangeante pour le public, qui restait convaincu que la Terre et les humains étaient le fruit d’une création divine. Si le scientifique y expliquait que seuls les descendants des organismes les mieux adaptés à leur environnement survivent et se reproduisent, transmettant les variations utiles à la survie de leurs descendants – un phénomène qu’il a baptisé “sélection naturelle” –, l’idée n’était pas du goût de nombreux autres scientifiques et de l’Église, surtout à cause de ce qu’elle impliquait pour l’origine des humains. Darwin n’aborde à aucun moment cette question dans son ouvrage, mais les critiques lui ont reproché d’avancer que “l’homme descend du singe”.
En réalité, Darwin n’a jamais tenu ces propos ; ils viennent du naturaliste français Jean-Baptiste Lamarck qui avait avancé cette idée cinquante ans plus tôt, dans l’indifférence générale. Ce propos, attribué à tort à Darwin, a fait scandale et n’a cessé d’être repris par ses détracteurs, mais aussi par certains de ses défenseurs qui y voyaient une hypothèse crédible. Dès lors, de nombreux scientifiques se sont mis en quête du chaînon manquant entre le singe et l’homme. On sait aujourd’hui que cette idée est une simplification grossière, car les primates actuels ne sont pas les ancêtres de l’homme mais ses cousins. Grâce aux avancées de la génétique, on sait que les bonobos ou chimpanzés nains (Pan paniscus) ont un génotype semblable au nôtre à 99,9 %.
S’ils font, comme nous, partie de la famille des hominidés, ils appartiennent à une autre branche. Notre ascendance se dessine peu à peu au fil des découvertes de fossiles ; on sait toutefois que notre espèce, Homo sapiens sapiens, est la seule survivante au sein du genre Homo, et que celui-ci a divergé des chimpanzés il y a au moins 7 millions d’années."
Autre anecdote, pour le plaisir si je puis dire. Une liste de mots est donnée à apprendre au quotidien à Gaëlle, je l'aide à réviser la chose, comme il se doit (le lendemain, il y aura une "évaluation" de l'élève, selon les termes consacrés). Je tombe sur "serpillière", sans le second "i" et demande à notre enfant de corriger pour l'avenir, indépendamment de ce qui a été imprimé sur la "liste". Le lendemain, ce mot tombe à l'écrit, elle le corrige donc selon mes recommandations, et le résultat ne se fait pas attendre, il lui est compté comme une faute (si, si).
Me revient à l'esprit ce que Pierre Bergounioux notait dans son Journal paru in Diérèse, où l'une de ses petites filles se voyait pénalisée par le fait que la maîtresse n'avait pas collé la fameuse "liste" dans le cahier de liaison et que l'enfant n'avait donc pas pu retenir l'orthographe des vocables à mémoriser. Pierre parle ici de "vilenie du monde adulte" : absolument. Une mésaventure arrivée aussi à notre seconde fille Diane, sans recours possible. Heureusement, me direz-vous, il ne s'agit là que de l'école primaire, par la suite, cela ne peut qu'aller mieux (ouf !)._____________
* le nom dudit a été changé