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  • "Lettres gersoises" de Serge Safran, éditions du Laquet, coll. Terre d'encre, fév. 1999, 128 pages, 9 €

    Serge Safran est né à Bordeaux et vit à Paris. Auteur de livres de poésie, récits de voyages et théâtre, il a d'abord partagé son temps entre son travail d'enseignant (professeur de lettres en lycée et collège à Sarcelles), de journaliste (notamment au Magazine littéraire), et de directeur aux éditions Zulma qu'il fonde en 1991 avec Laure Leroy.
    En 2011, il crée, au sein de Zulma, le label Serge Safran Éditeur, publiant deux à trois titres par an.
    Auteur de quinze livres, il poursuit ses publications personnelles, notamment son Journal intime : L'écueil de naître, dans La Revue littéraire.

    Le livre dont j'ai choisi un extrait, Lettres gersoises, fait partie de ses écrits intimes ; il a été publié dans une sympathique maison d'édition : les éditions du Laquet, où Gil Jouanard (écrivain évoqué il y a quelques jours dans ma note blog - rubrique Auteurs - sur C'est la vie) y a publié par deux fois, soit : Maramures - Terra incognita ainsi que Paris villages - Etapes a capella à travers l'harmonia mundi,
    Très actif comme éditeur, est annoncé en librairie le 9 janvier 25 : La double personnalité du criquet, chez Héliopoles collection Serge Safran.
    Pour l'heure, voici la cinquième lettre adressée à sa douce T., sur les dix-neuf que comprend l'ouvrage. En avant-propos, Serge Safran a écrit :
    "Un jour, des amis m'ont invité à partager leur immense demeure. Dans le Gers. L'amour était dans l'air, ainsi que dans les cœurs. Là, me dirent-ils, tu peux faire ta chambre, construire ton bonheur. Je leur obéis. J'étais désœuvré, désargenté, seul... L'amour vint. Puis il partit. Moi aussi. La vie l'emporte, c'est ainsi. Voici les lettres. Elles sont donc gersoises."

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  • "La Tristesse du roi", un poème de Daniel Martinez, d'après une toile de Matisse

    à Richard R.-W.

     

    Si bien qu'en vêture noire
    ce qui persiste au centre de la toile solennise
    forme un chœur autour de la plaie
    et le peintre    dont le visage a disparu
    dans les eaux basses de la nuit
    collecte les sonorités qui lui parviennent
    près desquelles il est     Lui
    depuis le puits de son oreille 
    celui qui continue d'animer la scène
    ses mains percluses d'arthrose voudraient
    bien saisir la guitare qui lui jure
    éternelle allégeance
    il n'y a plus dans l'atelier
    ni huile de lin ni siccatif
    mais pressentiments d'immortalité

    Seules les gouaches découpées
    réinventent à leur manière le flux fœtal
    la forme des formes au moment même
    où elle s'éprennent de réalité
    sans qu'ici représenté l'artiste
    puisse vraiment voir cette part d'invisible
    qui entoure la création
    encapuchonné qu'il est      une voûte
                                                où sèche le bois à feu
    que d'autres mers et d'autres cieux
    graveront en leurs lieux
    frôlant le ventre de la danseuse qui s'éploie

    Belle dont la poitrine semble celle 
    soulignant doucement courbes et contre-courbes
    dans l'ordre débridé des surfaces
    la transparence de sa carnation
    dévore l'espace clair
    Elle s'élève face à lui l'univers aux aléas contenus
    lui fait signe l'enveloppe uniment
    feuilles et plantes poussent de ses mains
    virevoltant de-ci de-là
    à l'échelle où notre regard
    ne se sent dominé de nulle part
                      reine en son genre
    qui fait de l'atelier une serre
    lianes estampillées de mille attentes
    semblables à celles lancées
    pour retrouver les pas d'un père
    sur les lieux mêmes qu'il aurait parcourus


    Vous êtes pris vous en êtes
    de ces auditeurs qui sentent
    aux sons du tambourin
    les rythmes premiers du monde
    ceux du Musicien suprême
    tout ce désordre apparent
    rassemblé du dehors au dedans
    glissant de leur atmosphère propre
    à celui du tableau en sa présence bleutée
    en son apesanteur sans jamais
    l'épuisement de sa transposition
    ses mains à lui au musicien
    illuminent ce qui reste de noirceur
    embellissent les indices 
    d'une prise de possession du monde
    par la musique des sphères
    toute une gamme de gestes simples
    condensent les veloutés sonores


    Des forces croissent indivises
    une volonté inconnue change d'expression
    librement hardiment
    éclate la Délivrance


    Daniel Martinez

  • "La langue des chemins", un poème de Daniel Martinez

    Au ponton d'une rime
    sur la table de verre tu écoutes
    bruire la solitude des jours
    mes mains en toi renouvelées
    abordent la langue des chemins 
    et le mufle luisant des roches
    touchent aux confins
    les plus reculés de la conscience
    peignent l'imaginaire
    de cet absolu

    Ce sont là-devant
    offertes     en attente
    peintures d'Italie claires
    une troublante dérive vers
    ces toiles de Nicolas de Staël
    peintes lors de son voyage en Sicile
    toute chronologie leur est inutile
    ce qu'elles donnent creuse la durée
    au gré de l'histoire
    d'une œuvre à l'autre reproduisent
    le même immobile
    frémissement


    Frère poète qui répondait
    au nom de Paul Engelibert
    tu t'es pareillement défenestré 
    un jour de décembre
    et le bleu se fit bas
    sur l'huile du soir naissant
    l'horlogerie des particules
    avait trouvé sa proie
    en un monde qui fait sien
    l'extrême que l'on ne peut élider


    Daniel Martinez
    27/10/24