"A l'écart", un poème de Daniel Martinez
A poem is not made of words
George Oppen
A l'écart il tombe le météore
indifférent à la gravité de l'enjeu
paré de la couleur de l'espérance
un vœu lancé à même
les anfractuosités de la pierre
mais toujours projeté
dans le frémissement du vide
dans l'intervalle qui sépare la chute
de quelques pétales
sa propre musique accordée
à cette peur dans ta poitrine
que le temps efface
ton histoire tout entière
à l'écart de l'esprit de conquête
des fibres de la nuit
cerclée des mots pauvres
de leur incomplétude
rien ne parle et tout résonne
du premier au dernier cri
sous le courant des souvenirs
jamais tu ne donneras pouvoir
aux pointillés qui bougent dans la page
mais sauras toujours maintenir
la nécessaire distance
pour retrouver la trace
d'un avenir libre
de s'éteindre à sa guise
à l'écart du bleu de la langue
et de l'absorption de la loupe
vrille la glotte du bègue
papillonnent les perles
il pleut des fragments de monde
l'autre en lui cherche une voie nouvelle
qui n'est pas moins chimérique
Entre tes mains caresse
ce que délivre le poème
bois à la destinée des flâneurs
suis la longue calligraphie déployée
par les ailes de l'aigle
lisible à la fin
lorsqu'entrevu ce peu
se sera dissipé
Daniel Martinez