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Diérèse et Les Deux-Siciles - Page 32

  • "Le coeur noir du soleil" : Daniel Martinez

     

    Laisser se perdre un son
    à peine est-il formé
    un sens, à peine formulé
    surgir s'enfuir
    écarter du regard
    le sceau de la poussière
    inciser le cœur noir du soleil
    qui chuchote dans l'orme attentif
    mille complaintes et mouvements de plumes
    le couver d'un souffle pénétrant
    celui-là même qui se joue
    des frontières et des rites
    route blanche vaisseaux de l'écorce
    où s'accumulent des petits riens
    semblables à notre histoire 
    grevée de fumées
    traversée du dessein de puissance



    Laisse se perdre ta voix
    sous les sifflets du vent
    car tout se défait
    à l'écoute des sables
    au double vide du saut de l'acrobate
    tu reviens de loin l'horizon penche
    et couvre un moment les partitions
    Diane reprend une gigue en ré majeur
    de Nicolas Chédeville le dernier des trois frères
    qui firent de la musique flamme nouvelle
    bois plutôt la beauté
    sous l'infime rumeur du chaos



    Et de grâce laisse tourner à l'aigre
    le mauvais vin, se flétrir
    la pourpre du rhododendron
    s'embraser les poignets du jongleur 
    sans savoir où demain
    nous conduira
    car telle est dans le fond
    comme dans la forme
    l'ambiguïté fondamentale
    qu'il importe de ne pas lever


    Daniel Martinez

  • Franck André Jamme : "Absence de résidence et pratique du songe", éditions Granit, coll. de l'Anneau, 5 janvier 1985, 120 pages, 70 F

    Ce livre comprend six sections regroupant pour les cinq premières des écrits de l'auteur (son pseudonyme était Marchant Ducel, ainsi que je vous l'ai déjà dit) parus en éditions limitées, sur beau papier, allant de juin 1979 (La flamme dans l'eau) à décembre 1984 (La Table d'orientation, recueil enté d'une aquarelle de sa compagne, Lucie). Poète de première importance, spécialiste de culture indienne, pas vraiment dans le goût de l'époque il est vrai, où la langue, le corps et l'écriture trop souvent ne forment pas un tout constitutif mais occasionnel, au mieux jointifs sans se fondre pour autant dans l'être qui les porte et les révèle. Retenons ici la formule saisissante de Jamme (in Bois de lune, 1990), pour qui le poète s'adressant à lui-même, s'en remet in fine à "la feuille transparente qui vole en toi et que tu ne pourras jamais saisir." A ainsi concevoir le poète comme révélateur, j'aime cette notion qui renvoie à la solution employée en photographie, et qui rend visible l'image latente, jugez-en par le contenu des prosèmes qui suivent, extraits de la sixième section du livre qui nous intéresse, inédite au moment de sa sortie - elle s'intitule :

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