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Diérèse et Les Deux-Siciles - Page 32

  • "Sans une ternissure", poème

    Près de l'ombre fendue par la beauté des grilles
    de la demeure où se perdre
    méandres
    du feu que le soleil dispense
    jusqu'aux pieds
    des rosiers
    gravés sur la porte-fenêtre

    puis derrière dans le cercle immobile du bassin
    par intervalles plus clair et plus vif
    des herbes flottaient là nageant dans les regards
    innervaient déjà nos membres
    une tiédeur rapportée
    au terreau que les mains nues fouillaient
    jonché de grumes pour y découvrir
    l'arc du pauvre dieu entre les strophes
    entre les lignes improvisées du poème
    c'était l'été au-dessus de nos têtes
    dans l'air sucré mêlé à la paix des choses
    à leur grandeur à leur mystère
    avec une spontanéité glissante si naturelle
    qu'elle dépassait tout étonnement
    et recomposait couleur sur couleur
    les chaînons manquants de la vie

    Daniel Martinez

  • "Une chambre conjecturale, poèmes ou proses de jeunesse par Paul Valéry", éditions Fata Morgana, 88 pages, 17 mars 1981, 1000 exemplaires

    Peu connus des lecteurs, les écrits de jeunesse de Paul Valéry méritent pourtant l'attention, tant ils préfigurent l'œuvre future, déjà exigeants quant au style, préoccupation première de l'auteur de La Jeune Parque, dont les trente textes choisis sont bien des poèmes en prose, malgré la relative ambiguïté du titre. Le recueil "Une chambre conjecturale..." est ici préfacé par Agathe Rouart-Valéry, fille de l'écrivain qui précise que "ces adolescentes proses", antérieures à la "nuit de Gênes" "datent de 1888 à 189... ; l'auteur avait de dix-sept à vingt et peu d'années."
    J'aime particulièrement dans ces textes cette façon qu'a Valéry de se qualifier : "Acrobatique poète, clown/
    Je désire m'élancer d'un bond et sauter dans le vide bleu..." ; et qui, dans à peu près le même registre renvoie au poème "Clown" d'Henri Michaux, lui se voyant alors "vidé de l'abcès d'être quelqu'un" et concluant par "Je plongerai. / Sans bourse dans l'infini-esprit sous-jacent ouvert à tous..." (Peintures, 1939).

    Voici :

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  • "Narcose" de Marie-Françoise Prager, éditions Guy Chambelland, 1966, 89 pages.

    Premier des trois seuls livres publiés par cette auteure par le même éditeur, Guy Chambelland dont on ne peut que louer le travail de découverte qui fut le sien, avant qu'elle ne voie ses œuvres complètes éditées par Olivier Cabière dont la petite maison d'édition s'appelait L’Arachnoïde - ce, en 2008, et sous le titre générique : Narcose, Œuvres.
    On sait seulement que Marie-Françoise Prager est née en 1925, à peu près rien d'autre. Dans Le Matricule des Anges, Richard Blin écrivait à son propos :
    "Où sommes-nous ? Dans quel monde ? Dans quel type de réalité ? De quelles souffrances, de quelles expériences, de quels enclavements sont nés les trois recueils, jadis édités par Guy Chambelland, formant l’œuvre : Narcose (1966), Rien ne se perd (1970) et Quelqu’un parle 1979) ? Nul ne saurait le dire car on ne sait rien de l’auteur. S’impose en tout cas une écriture qui happe, trouble, échappe. Qui fulgure à blanc, impose au poème son univers de perceptions tronquées, négocie l’immédiat bouleversé de ses envols immobiles contre le prestige sournois d’adoubements funèbres." Voilà qui a eu de quoi désarçonner la critique. Il conviendrait d'ajouter que cette authentique poète, par trop discrète, n'a pas de grande chance de figurer un jour en anthologie, ce qui est bien dommage car dans son meilleur elle a su se montrer tout aussi inventive qu'une Béatrice Douvre.
    Chez Marie-Françoise Prager les mots sont parfois de simples accompagnateurs, elle qui se risque à ressentir sa chair comme "préhistorique", n'hésite pas à réagencer l'ordre des vocables, voire à les dépareiller, à en pervertir le sens dans un amoncellement jubilatoire, pour le plus grand plaisir de l'image, de l'oreille aussi bien. Elle s'arrête d'écrire à 54 ans, "tout" a été dit, rideau !

    Lisons-la si vous le voulez bien dans les poèmes qui suivent, extraits de Narcose :

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