- Page 3
-
-
"La Foudre", de Lydie Dattas, éditions Mercure de France, 128 pages, 14,50 €
Par Christian Bobin
Il n'y a de vérité que dans l'élan.
Dix ans après, allégée de sa cargaison d'adjectifs, la barque d'or de "La Foudre" accoste au rivage des librairies. Montons à bord. En dix ans le monde s'est enténébré et les visions délivrées par cette écriture sont porteuses de remèdes. "Pas moi" fut la parole de la fillette de quatre ans quand sa mère actrice, décidant de commencer une carrière en Angleterre, emporta toute la famille dans la tornade de son angoisse. La grande sensibilité n'est parfois pas séparable de la grande psychiatrie. L'exil frappa au cœur ses trois enfants couverts de dons, et son mari, compositeur, titulaire du grand orgue de Notre-Dame que par amour il quittera. La petite "Pas-moi" grandit à l'intérieur de ce faux calme qui est au centre d'un cyclone. Elle y vole de merveilles en merveilles : son goût surpuissant de la vie fait d'elle l'héroïne du premier livre cartonné qui l'a éblouie, "Les Mille et Une Nuits". "La Foudre" est "Les Mille et Une Nuits" en miniature. "J'aimais tellement la vie, dit Lydie Dattas dans son "Carnet d'une allumeuse", que j'aurais pu en mourir. Percé de soleil rouge mon verre de grenadine m'était une Sainte-Chapelle." Elevée dans le froid des églises sous les stalactites des orgues, elle sera attirée par l'archétype contraire, un antidote : le Cirque d'Hiver de Paris.