"Le petit livre des champignons", texte de Myriam Blanc accompagné de 80 illustrations, éditions du Chêne, août 2012, 176 pages, 17,42 €
Superbe petit livre aux tranches dorées à l'or fin, à la couverture dédiée au Cèpe de Bordeaux, champignon le plus vendu dans le monde, dont Myriam Blanc nous parlera plus bas. En préambule, elle rappelle utilement que les 30 000 espèces de champignons recensés depuis Linné (1707-1778) ne sont ni des végétaux car "ils n'ont pas de racines, ni feuilles, et ne sont pas à même de réaliser de photosynthèse" ; ni "des animaux, bien que les parois de leurs cellules soient constituées de chitine, à l'exemple de la carapace des arthropodes. Ils font partie d'un règne singulier, que l'on a nommé « règne fongique », à partir du terme latin fungus qui désigne les champignons."
L'automne étant la saison propice à la croissance de ce que le latin populaire désignait par campaniolus, littéralement "(produit de) la campagne", c'est donc aujourd'hui un produit de saison (bien arrosée au demeurant - notamment dans l'Hexagone) qui est à l'honneur. Il à inspiré ces quelques vers inédits à l'un des auteurs de Diérèse, Claude Albarède :
Lisière
En lisière
ce ne sont pas
les retenues pierreuses
ni les abrupts
déchirés d'éboulis
qui arrêtent le pas...
mais l'odeur d'un cèpe
en chapeau grivois
lutinant la forêt !
Claude Albarède
Le cèpe de Bordeaux
Boletus edulis
Comestible
Si l'amanite des césars (oronge vraie) est le champignon des rois, le cèpe de Bordeaux a souvent été sacré roi des champignons. Il le doit tant à ses incontestables qualités gastronomiques qu'à sa taille parfois imposante, puisque son chapeau peut mesurer jusqu'à 30 centimètres de diamètre et il peut peser plus de deux kilos. Il est très commun en été et en automne dans les forêts de feuillus ou de conifères, surtout dans les lieux aérés et ensoleillés. Il a peut-être une petite préférence pour la région aquitaine, qui lui aurait donné son nom, cep signifiant "tronc" en gascon, en référence à la taille de son pied. Les négociants bordelais furent sans doute les premiers à le commercialiser à Paris, où le célèbre chef du Grand Café Anglais, Alcide Bonton, le popularisa au XIXe siècle.
Mais ce bordelais est aussi connu sous le nom de "polonais", car au tournant du XVIIIe siècle, Stanislas Leszczynski, roi détrôné de Pologne et fin gastronome, le faisait cuisiner en sa cour de Nancy. La cuisine bordelaise l'accommode en général à l'ail, frit dans la graisse de canard ou grillé, les chapeaux conservés entiers. Ce cèpe est un champignon courant, mais les cueilleurs se livrent une concurrence acharnée... Un indice peut faire la différence : la présence de jeunes amanites tue-mouches, une espèce qui fréquente les mêmes biotopes et apparaît quelques jours plus tôt !
Myriam Blanc