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"Feuilles de tremble" : Jean Lescure (1912-2005)

En ces temps carnassiers, la poésie resterait ce qui continue de briller, même les yeux fermés  - quand à mon sens il convient de les garder ouverts, et par elle réduire autant que faire se peut ce qui blesse et l'âme et la raison.

... Ceci dit, c'est de Jean Lescure dont il est question ce jour. On se souvient qu'il fut revuiste, éditeur, comme le traducteur des Cinq Livres du poète italien Giuseppe Ungaretti (Minuit, 1954) ; qu'il fut, en 1960, l'un des fondateurs de l'Oulipo où il "inventa" la contrainte dite "S + 7", pour se voir reconnaître le titre de "régent d'anabathmologie" du collège de pataphysique. On citera en particulier, dans son œuvre de poète : La plaie ne se referme pas, Charlot (un éditeur dont j'ai déjà eu l'occasion de vous parler, cf : http://diereseetlesdeux-siciles.hautetfort.com, rubrique Editeurs, note du 17/1/2017), paru en 1949 ; Drailles, chez Gallimard, en 1968 ; Itinéraires de la nuit, chez Clancier-Guénaud, en 1982 ; Gnomides, chez Proverbe, en 1999. 
Ici, ce sont des feuilles de tremble - un arbre au nom si évocateur, texte écrit par en hommage aux "Jardinières du jardin perdu" - feuilles qu'anime pour nous Jean Lescure :

UN PONT.jpg

Dessin (aux fusains) de Pacôme Yerma

 

Sans titre.png

Feuilles de tremble

A courir les saisons le vent ne s'use pas

             C'était comme une nuit au milieu du silence
             aucun regard pour marquer l'heure
             aucune main pour la fraîcheur
                         aucune source
             seule au creux de la paume
             un peu d'eau qui me regardait

A soleil rouge vent promis
à soleil vert la mort s'avance
longtemps longtemps pour que paraisse
à la pointe de tes doigts
l'aile calme d'un mouchoir

                          Le feu n'a pas raison du soir
                          paraissez ombres de la mort
                          de l'amour la maison garante
                          raconte le divin silence

Il y eut un moment
le printemps parut respirer
la peau des choses s'étonner
plus tard elles attendaient
encore que je leur parle
le silence n'était pas assez grand

                        Jardinières du jardin perdu
                        les mains échappent aux saisons


Jean Lescure

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