"La traversée du corps", Daniel Martinez
Est-ce pour ce temps qu'est donné
tout le temps renouvelé
aussi peu désireux que nous
d'en connaître le terme
l'épuisement du monde
derrière le pays de l'été
ses syllabes muettes tout imprégnées
d'une origine à peine marquée
inscrite à l'horizon
Est-ce les pleurs de l'arbre après qu'il a plu
qui se feraient l'écho de nuages
égarés dans l'intervalle d'un espace intérieur
poreux mouvant cotonneux
frôlant sans s'arrêter
la plénitude du vivant
les souches d'orme rongées de mousse
ou les motifs des ailes du Grand Mars
Est-ce frappée d'un rideau d'or
l'allée soudainement redécouverte
née au cœur de la rousse
lumière d'octobre
parmi les touffes d'herbe qu'elle égaie
qui persiste dans l'esquisse
d'une splendeur refoulée
à même la langue du quotidien
avec ses faiblesses admises
ses reflux impénitents qui nous parlent
de l'enfance galvaudée
du glissement de la péniche dans la fenêtre
au moment d'éprouver
entre l'air et l'eau
le temps d'un frôlement
ce que l'histoire défait à mesure
jetant à terre les images
dont nous ne serions en somme
que les témoins fictifs ?
Daniel Martinez
le 9 janvier 2024