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Deux recueils de poésie, les tout premiers de Christophe Manon, ne sont pas cités dans sa bibliographie : Les Treize empereurs d'abord, paru aux éditions Les Deux-Siciles le 27 novembre 1998, imprimé à 222 exemplaires. Ce livre traite des luttes intestines entre souverains incas. Dans les années 1520, les aventuriers du souverain espagnol Charles Quint, les fameux conquistadors, sillonnent la côte pacifique de l'Amérique du Sud. L'explorateur Francisco Pizarro découvre alors l'empire de Tawantinsuyu. Dirigé par le souverain Atahualpa, l’État inca est en proie à des luttes fratricides qu'exploiteront les Espagnols. Cet affrontement transformera à jamais le continent américain. EtFieffé soleil,ensuite, ouvrage publié par les éditions de l'Attente, le 19 décembre 1999. Né le 19 mars 1971 à Bordeaux, romancier aussi bien que poète, c'est une voix singulière que la sienne. Christophe Manon a su tracer sa voie sans se perdre au passage dans les modes littéraires, lui qui se plaît à écrire : "Je ne suis pas poète, j’écris de la poésie, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Cela n’a aucun caractère essentialiste, j’y tiens beaucoup." Il a publié dans trois livraisons de Diérèse, les numéros 4 (p. 11 à 15 ), n°6 (p. 13 à 14) et n°8 (p. 142 à 144, sorti en décembre 1999, ses poèmes étant illustrés par Claude Forest).
Voici les quatre premiers poèmes de Fieffé soleil, imprimés sur papier chamois : on appréciera particulièrement la minutieuse découpe des vers, à lire à haute voix pour ne rien perdre de leur musique intérieure, comme de leur gravité :
I
un sillon une croix chaque mot et plus lourd que toutes les biles son visage sans fin fleuve ou tuf ses hirondelles meurtries les étraves du temps ô les plaines brûlées de soleil la Garonne et son coude argenté et lui déjà moins lui et lui devenu autre par la loi du mouvement par les ulcères de rire le rasoir de la tauromachie
2
le souffle de Lascaux la langue le bruit de la caverne et ses parois trempées oui la gorge et le poème serti de brumes l' enfant que nul n'effraie et lui pauvre figure cherchant dans les livres des mots des couleuvres et dans ses mains la luzerne de vivre point attaché à ses frusques ni rayonnant de nulle joie toujours la tête penchée et l'œil toujours enfoncé dans les os
3
devenu ombre parmi les ombres écorce parmi les écorces en quête de merveille en ce siècle balafré et déjà dans les crocs du troisième millénaire il va fixer nulle part et son cœur errant aussi pareil à l'angélus et au bouffon et la carne de son chant calciné le salut le rêve du chaman mais la douleur
4
pierre ou galet au centre du cœur aussi pesant qu'une tombe le monde et plomb dans le crâne sale vertige forçat ou bourreau Dieu sa face ne la connaît point ni son cul cependant féroce cloporte la mort entre les dents la pupille des anges les vitraux d'aimer comme une carpe blanche et dans ses lourds sanglots la musique impalpable du sang