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La veuve noire, Daniel Martinez : de l'image au poème

PIROTE 07.png

Encre de Chine, Jean-Claude Pirotte, 2007

 


La veuve noire


Trois paires de taches rouges sur l'abdomen
conjuguées aux bruns aux ors des futaies
aux verts étoilements des végétations
d'où la veuve noire se sera extirpée
le danger pressenti


Brillante salive que la sienne
pointes sourdes des chélicères
tous les corps l'intéressent
pourvu qu'ils soient à sa portée
sous un parfum de feuilles remuées
leurs tendres camaïeux 


La malmignatte corse jubile
au prix de mille précautions esquisse sa toile
dont le bonnet unit l'ombre et la proie
le dessin des orges solaires
aux reliefs de son festin solitaire


Plus grande que le mâle 
choisi pour se satisfaire
c'est avec le plus grand naturel
qu'une fois l'acte consommé 
écorchant le crapuleux compère
elle s'en débarrasse sans tarder :
de cette faculté lui vient son nom
pour le moins mérité


Mesure hypnotique de qui
tire sur des fils à l'estime
sans jamais trop savoir
lequel maintiendra l'équilibre
ou découvrira
le vif éclat
d'un curieux sablier
sur la face ventrale de l'opisthosome


Petit bijou de sérénité
suspendue dans le vide
d'un royaume mal aimé
le jouir et le mourir confondus
sur un même clavier
elle est maîtresse du temps compté
dessin de nuit tombé des nues


Daniel Martinez

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