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  • "La naissance de l'instant", un poème de Daniel Martinez

    Que fais-tu là porte ouverte à tous vents
    sous la vague des années
    à suivre des yeux
    l'écho d'une figure singulière
    où l'ici serait un maintenant


    pour ainsi dire happé
    par les matins de gel
    l'hiver se prononce à cette heure
    sourd aux incantations de la foule


    sourd à ce qui plonge
    au cœur du froid en ses terres là même
    où s'étiolent les corridors d'une vie
    tu te crèverais les tympans
    pour ne plus entendre gémir
    sous tes pas maints royaumes 


    pour ne plus te soucier
    que de la naissance de l'instant
    langue arrachée 
    à ce qui n'est pas visible
    sans que tu saches au vrai
    où accrocher tes doigts
    où demeurer plus que jamais


    Que fais-tu là porte ouverte
    mendiant des repères
    à redouter que rien vraiment
    ne se décide à croître

    hors
    l'inventive cruauté humaine


    Daniel Martinez

  • "Le Visiteur qui jamais ne vient", de Roger Munier, éditions Lettres Vives, coll. Nouvelle Gnose, mai 1983, 64 p., 49 F.

    Deux mois à peine après que Roger Munier avait terminé d'écrire "Le Visiteur...", soit le 22 mars 1983, son éditeur fit paraître ce livre, bien dans le ton du philosophe-poète, dont la langue épurée autant que réfléchie ouvre sans discontinuer le champ sémantique et dénonce les faux-semblants de la pensée : dans un souci de rigueur qui tente de délivrer les mystères du monde que l'écrivain scrute pas à pas, d'un fin regard de connaisseur. En préface à ce livre, Roger Munier précise : "Il (ndlr : le Visiteur) est le sens qui se diffère, l'espoir ou la vision qui s'offrent autant qu'ils se dérobent, la sérénité, en un mot, de l'attente qui n'est qu'attente, mais s'illumine comme attente."

    Roger Munier a bien connu le poète Paul de Roux, qui dans ses Carnets mentionne, en date du 4 août 1984, un extrait d'une lettre que celui-ci lui avait adressée : "Décrire, simplement décrire est peut-être la plus haute pensée. Dans le passage aux mots, se lève comme un absolu de la chose. Ab-solu, détaché, vibrant, dans ce passage..." (in Les intermittences du jour, éd. Le temps qu'il fait, 1989). Toute sa quête pourrait ainsi se résumer, sans fioriture aucune, mais touchant à l'essence, à l'essentiel.

    Ecoutons-le plutôt :



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